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Que se passe-t-il à Blad al Sham ?

 

Par Albert Soued, écrivain et journaliste, http://symbole.chez.com pour www.nuitdorient.com

19/06/16

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Pour comprendre ce qui se passe dans cette région du Moyen Orient où on a déjà compté 2 millions de morts entre 1980 et 1988 et où on compte aujourd'hui près d'1/2 millions de morts.  Cet espace est ravagé par des guerres où une douzaine de parties s'entremêlent, avec des intérêts particuliers divergents.

 

Pour faire simple, il faut lister les objectifs de chaque intervenant.

 

Bashar al Assad hérite par hasard de la Syrie où son père Hafez a installé d'une main de fer gantée la dictature d'une ethnie minoritaire dans le pays, les alaouites, secte shiite à mi-chemin entre l'Islam et le Christianisme, abhorrée par la majorité sunnite. Devant le "printemps arabe" qui s'est emparé de son pays et qui s'est vite transformé en un sanglant règlement de comptes entre divers groupes antagonistes shiites et sunnites. Son but est de récupérer le maximum de territoires perdus à al Qaeda et à l'Etat Islamique, groupes radicaux salafistes, avec l'aide de la Russie, du Hezbollah libanais et de la milice iranienne Al Qods, légion étrangère dirigée par Qassem Souleimani, général recevant ses ordres directement du Guide Suprême Ali Khamenei.

La Russie cherche à avoir un accès à la Méditerranée orientale, et des bases protégées sur cette côte, avec les ports de Lattakiéh et de Tartous, ce qui nécessite la possession par son allié alaouite de toute la zone côtière syrienne et plus, si possible.

L'Iran des Ayatollahs cherche par divers moyens, dont le nucléaire, à asseoir son hégémonie sur le Moyen Orient.

L'Etat Islamique, comme al Qaeda son challenger, cherchent à occuper le maximum de territoires pour y imposer la "shariah", la gouvernance radicale selon le Coran.

Les Kurdes constituent une ethnie sunnite à part couvrant des territoires en Turquie,  Syrie, Irak et Iran. Ce sont les seuls guerriers se battant pour la préservation de leur identité ethnique. Ils ont réussi à récupérer presque tout leur territoire en Irak, où ils sont autonomes, et une bonne partie en Syrie.

La Turquie joue un jeu double et trouble. D'un côté, son objectif est d'empêcher les kurdes de former une région continue autonome en Syrie, qui menacerait la Turquie kurde. D'où le bombardement continu de la ville de Qamishli par l'aviation turque.

D'un autre côté, elle fait croire à l'Occident qu'elle se bat contre les islamistes, alors qu'elle leur a acheté du pétrole et les a approvisionnés en combattants. Le président Erdogan a comme ambition de reconstituer l'empire musulman d'autrefois.

L'Occident, notamment la France, cherche à préserver des marchés et des approvisionnements, tout en cherchant à plaire aux minorités musulmanes, sur le plan électoral, mais ses interventions diplomatiques ou armées mettent souvent de l'huile sur le feu.

En Irak, les interventions américaines ont contribué à renverser une dictature sunnite minoritaire dirigée par Saddam Hussein au profit d'un gouvernement shiite. Les dirigeants compétents de l'armée irakienne, souvent des sunnites, ont été écartés et ils vont constituer l'encadrement du nouvel état islamique ou "Daesh", acronyme de "dawlat islamiya fi bilad al Sham" (nation musulmane en grande Syrie). En peu de temps, cet Etat islamique, appliquant la shariah, va occuper une bonne partie de l'espace Syrie/Irak. Le départ précipité des troupes américaines, qui avaient pacifié quelque peu le pays avec le général Petraeus, les a aidés, en comblant le vide laissé.

 

Qu'en est-il aujourd'hui ? 25% de la population syrienne et 10% de la population irakienne est déplacée. Du fait du bombardement coordonné des aviations russe et américaine, l'Etat islamique est en recul stratégique. Mais l'humus de "Blad al sham" est tribal et c'est à ce niveau que le destin se précise. La brutalité d'application de la shariah par l'Etat islamique n'a pas fait plaisir à nombre de tribus qui, au bout de 2/3 ans ne veulent plus de cet extrémisme musulman. Mais dans le chaos d'après-Saddam qui dure depuis une génération, le gouvernement central a un pouvoir limité, entrant de plus en plus sous la dépendance de l'Iran, au grand dam des "conseillers américains", de la Turquie et de l'Arabie.

 

Ainsi la ville stratégique de Falouja vient d'être libérée du joug islamiste par les pasdarans, sous la direction du général de la brigade al Qods, Qassem Soulimani lui-même, présence considérée comme "négative" par les opposants cités ci-dessus et surtout par l'armée irakienne qui se méfie de ces troupes étrangères qui viennent l'aider.

 

Le Hezbollah rassemble le gros de ses troupes venant aussi bien du Liban que de fronts divers en Syrie, pour rejoindre les milices shiites d'Irak et reprendre toute la vallée de l'Euphrate, en passant par Deir al Zor.

 

20 000 kurdes de l'YPG et 5000 hommes du Front Démocratique Syrien (des Chrétiens et des Syriaques) se rapprochent de Raqqa, le centre de l'Etat Islamique en Syrie, et occupent toutes les villes importantes qui en sont proches. Ils sont aidés au sol par des "conseillers américains" et dans les airs, par les raids de la coalition russo-américaine. La chute de Raqqa n'est pas loin.

Les peshmergas kurdes encerclent depuis un certain temps Mossoul qu'ils souhaitent libérer sans l'aide de l'armée irakienne, sous obédience iranienne.

 

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