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C'est l'Amérique qui Détient la Solution du Problème Iranien

 

Par Aldo-Michel Mungo

Analyste en géostratégie -Directeur de la rédaction du magazine militaire Carnets de Vol

25/07/10

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Tout porte désormais à croire que les Etats-Unis sont décidés à régler rapidement la question du nucléaire iranien. Les dernières déclarations du chef de la CIA, Léon Panetta, sur les capacités perses à se doter dans les 24 mois de 2 bombes ; le vote de nouvelles sanctions restreignant les capacités d'approvisionnement en carburant et l'annonce quasi simultanée du retrait de Total du marché iranien, rejoignant BP et Shell ; les bruits de manouvres en Azerbaïdjan et les déploiements navals américains d'envergure préfigurent que nous entrons dans la dernière ligne droite.

 

Baptisé, en 2004, du nom de code TIRANNT (Theater IRAN Near Term), par ses planificateurs militaires US, les plans de guerre contre l'Iran ont commencés à être élaborés sous l'administration Clinton entre 1995 et 2000 sous le nom de code CONPLAN 8022, qui prévoyait déjà une guerre contre l'Irak. Les planificateurs du CENTCOM ont envisagé des scénarios incluant tous les aspects d'une opération importante de combat, depuis la mobilisation et le déploiement de forces jusqu'aux opérations d'après guerre.

La composante opérationnelle de l'agenda militaire concernant l'Iran a été lancée, dès la fin des opérations en Irak, en mai 2003, quand les concepteurs de modèles et les spécialistes du renseignement ont rassemblé les données nécessaires pour une analyse de scénario à grande échelle. L'Army, la Navy, l'Air Force et les Marines ont tous préparés des plans de bataille et ont passé les sept dernières années à construire des bases et à s'entraîner pour l'opération Iran Freedom. Les Marines se sont concentrés sur leur propre spécialité, l'entrée forcée. Un concept d'opérations qui explore la possibilité de déplacer des forces de navires vers la terre ferme, sans établir auparavant une tête de pont sur la côte. Divers scénarios impliquant les missiles iraniens ont aussi été examinés, dans une autre étude démarrée en 2004 et connue sous le nom de BMD-I (Balistic Missile Defense-Iran). Dans cette étude, le Centre d'analyse de l'armée de terre a modélisé les performances des systèmes d'armement US et iraniens pour déterminer le nombre de missiles iraniens dont on pourrait s'attendre à ce qu'ils percent les défenses de la coalition. Ces plans ont été tenus à jour depuis leur initiation. Ils prévoient également que les bombardiers et les missiles de croisière soient prêts à entrer en action dans les douze heures suivant un ordre présidentiel.

La préparation initiale d'une guerre contre l'Iran s'est terminée en novembre 2004, lorsque le CentCom a mené un exercice d'Etat-major dénommé Global Lighting, à la suite de quoi il s'est déclaré en état de préparation avancé. Depuis cette époque, l'entraînement des forces des Etats-Unis et de tous ses alliés n'a jamais été aussi optimal ; les exercices s'étant enchaînés de manière continue.

 

Shock and Awe

L'ensemble des opérations offensives est placée sous la doctrine Shock and Awe (Choc et Effroi ou Stupeur), un concept de domination rapide qui a été partiellement mise en ouvre en 2003 durant la troisième Guerre du Golfe.

Cette doctrine est basée sur l'écrasement de l'adversaire à travers l'emploi d'une très grande puissance de feu, des frappes globales, la domination du champ de bataille et des démonstrations de force spectaculaires pour paralyser la perception du champ de bataille par l'adversaire et annihiler sa volonté de combattre.

La domination rapide est définie comme l'effort pour porter atteinte à la volonté, au ressenti et à la capacité de compréhension de l'adversaire qui lui permettent de s'adapter ou de répondre aux opérations. Elle permet d'imposer un niveau de choc tel que la volonté de l'adversaire à continuer la lutte est anéantie. Elle a pour but de prendre le contrôle de l'environnement, de paralyser les perceptions de l'adversaire et ses capacités de compréhension en les saturant de manière telle qu'il se retrouve incapable de résister sur les plans tactique et stratégique. C'est l'état désiré d'un sentiment d'impuissance et de perte de volonté. Il peut être obtenu par la destruction des centres de commandement ennemis, une suppression des informations diffusées et la propagation de désinformation, le débordement des forces adverses et la rapidité d'action.

Dans le cadre des opérations contre l'Iran, ce concept doit évoluer vers celui de Force décisive. La différence se situant au niveau des objectifs, de l'usage de la force, de la rapidité et des pertes engendrées.

Cela requiert l'interruption de tous les moyens de communication, de transports, de production alimentaire, de distribution d'eau, et de toutes les autres infrastructures. D'une manière générale, les opérations doivent provoquer un sentiment de menace et de peur d'agir

Pour parvenir à ces buts, il faut d'une part la destruction physique de nombreuses infrastructures et d'autre part l'interruption et le contrôle de tous les flux d'informations et commerciaux, et ce de façon si rapide qu'on puisse obtenir un choc comparable à celui obtenu par les bombardements nucléaires d'Hiroshima et de Nagasaki sur les Japonais.

Il s'agit de réaliser la décapitation instantanée de cibles militaires et civiles choisies pour obtenir le Choc et l'Effroi. Pour y parvenir il faut des niveaux élevés de destructions massives instantanées, presque incompréhensibles, ayant une influence directe sur l'opinion publique et sur les élites dirigeantes, avec en parallèle le ciblage d'objectifs militaires ou stratégiques qui anéantissent toute velléité de résistance.

Très rapidement, la junte islamique au pouvoir et toutes les strates de commandement seront épuisés, physiquement, émotionnellement et psychologiquement. L'attaque doit permettre de détruire quantité d'installations et de matériels que les Iraniens ont mis trente ans à construire et qu'ils ne pourront pas remplacer.

Un général italien de l'Etat-major du Shape a comparé les premiers jours de cette campagne à l'attaque d'un essaim de guêpes.

 

10.000 cibles à détruire

Les objectifs de guerre sont connus : neutraliser de façon irréversible le programme militaire et les capacités de nuisances futures de l'Iran. Pour ce faire le concept opératif (Operational design) mise en priorité sur les capacités militaires à établir, dès les 24 premières heures des opérations, un bouclier antiaérien et antimissile dans tout le Moyen-Orient, tenir ouvert le détroit d'Ormuz, obtenir la suprématie aérienne et la conserver et neutraliser les systèmes de commandement du régime.

Outre la neutralisation du programme nucléaire, les objectifs de l'après-guerre sont de persuader la population de changer de régime, de neutraliser définitivement les dirigeants mystiques et de contrer durablement l'influence du Mahdaviyat sur la société iranienne, cette secte qui prône l'Apocalypse pour accélérer l'arrivée du Mahdi.

Le CentCom a déjà identifié plus de 10.000 cibles à détruire, il s'agit de l'ensemble du potentiel industriel militaire iranien, de ses stocks de matériel et de l'armée idéologique des Pasdaran et de ses auxiliaires Bassidji. Les sites nucléaires feront l'objet de mesures de précaution pour éviter la dispersion d'un nuage radioactif préjudiciable aux populations civiles.

Depuis 2004, l'essentiel de la préparation du CentCom a été de développer ses capacités de renseignement, déterminer les sites devant faire l'objet d'une frappe militaire et définir les moyens appropriés pour leur destruction.

Outre les Centres de commandement, et les sites de lancement de missiles sol-sol de tous types, il faut détruire toutes les capacités navales de l'Iran, occuper les îles qui contrôlent le détroit, et occuper la zone des marais en face d'Ormuz où se cachent les vedettes rapides des Pasdaran. Car le point faible américain est la capacité des Iraniens de s'attaquer aux navires de la Navy ; la vulnérabilité de cette flotte est grande dans un conflit asymétrique et dans l'espace confiné qu'est le Golfe. En avril 1988 les américains se sont déjà opposés aux marins iraniens à la bataille de Sassan et Siri et ont pu mesurer l'excellent niveau de leurs opposants.

Depuis l'été 2008, les Pasdaran ont pris la direction des opérations navales dans le Golfe et le détroit, la marine se recentrant sur la mer d'Oman. Les principales bases navales dans le Golfe sont Bandar Abbas et Bushehr. Ils utilisent également les nombreux ports qui s'échelonnent le long du Golfe, dont celui d'Assalouyeh, ainsi que les îles et les plates-formes pétrolières contrôlées par Téhéran.

La marine a déplacé ses infrastructures sur les côtes du Baloutchistan, baignées par la mer d'Oman. C'est dans le cadre de ce redéploiement stratégique qu'à été inauguré la nouvelle base de la presqu'île de Jask, située à 300 kilomètres au sud-est de Bandar Abbas. Il a également été décidé de construire d'autres infrastructures portuaires à proximité de la frontière pakistanaise, dans la région de Chabahar dont les installations actuelles sont sommaires.

La marine iranienne possède trois sous-marins 877 EKM de classe Kilo (Tareq, Noor et Yunes), un destroyer Jamaran entré en service en 2007, trois frégates Alvand, Alborg et Sabalan, trois corvettes Bayandor, Naghdi et Hamzeh, onze vedettes de classe Combattantes II et dix navires lance-missiles de classe Thondor. Déployés sur les côtes sud de l'Iran, ces bateaux lui permettent de faire peser une menace en mer d'Oman. La plupart des chasseurs-bombardiers Su-24 Fencer et F-4E Phantom II, capables de lancer des missiles air-mer C-801K, C-802 Noor et Kowsar-2, sont aussi déployés sur les côtes sud pour appuyer la flotte iranienne. Les Pasdaran alignent des navires de transports de troupes, 5 navires garde-côtes, 14 aéroglisseurs, 10 vedettes China Cat, une quarantaine de vedettes rapides de fabrication locale et nord-coréenne armées de missiles mer-mer ou de torpilles et 1.300 embarcations légères équipées d'armes d'infanterie, dont des missiles antichars. De plus, ils possèdent une flotte de sous-marins de poche : 5 Ghadir, 4 Yugo et 2 Nahang qui servent pour l'infiltration de commandos, la pose de mines par des nageurs de combat et occasionnellement à l'attaque à la torpille de navires.

L'Iran a donc les capacités de pratiquer une guérilla navale à coup d'opérations commandos. Mais pourrait ne pas se contenter d'un simple harcèlement et lancer des opérations derrière les lignes, avec le concours d'une fraction de la communauté chiite implantée à Bahreïn et en Arabie saoudite. Avec sa flotte d'aéroglisseurs et ses unités aéroportées par hélicoptères, les Pasdaran sont capables de porter le combat au cour du dispositif allié.

Plus préoccupant est le P-800 Yakhont (SSN-X-26) russe, un missile de croisière supersonique d'une portée de 300km, qui rend tous les bâtiments présents dans le Golfe vulnérables. Le missile peut être tiré depuis la terre ferme et les Iraniens ont installé des sites de lancement tout le long de ses côtes.

Toute opération doit donc décapiter en premier lieu les capacités offensives, ainsi que les centres de décision et de commandement, à l'aide de bombardements massifs. Doivent ensuite être exécutés la prise de contrôle complet de l'espace aérien, la neutralisation de tous les systèmes anti-aériens et la destruction des Pasdaran et de leurs capacités militaires dont le dispositif terrestre est organisé en 31 régions. Car les Pasdaran, considérés par les USA comme organisation terroriste, seront les cibles prioritaires dont l'élimination physique sera systématique. Les plans du CentCom incluent des opérations terrestres au départ de l'Irak et de l'Afghanistan par des raids en profondeur exécutés par les forces spéciales et les Marines, dont 9.000 hommes supplémentaires viennent d'être déployés dans l'Helmand, la province afghane frontalière de l'Iran.

 

La défense anti-aérienne

Depuis septembre 2007, l'Iran réforme en profondeur son système de défense dans le but de pouvoir répondre à toute agression avec un maximum d'efficacité. En 2009, la composante de défense anti-aérienne est devenue un Commandement indépendant au même titre que l'Armée de l'air. Cette dissociation tend à prouver que les Iraniens ne se font pas beaucoup d'illusions sur la capacité de leur aviation de chasse à contrer une attaque adverse. Ils semblent donc dédier la défense de leur espace aérien aux seuls moyens sol-air. Aujourd'hui la défense contre aéronefs est concentrée autour des sites sensibles et de la capitale, mais ne couvre pas l'ensemble du pays. Les armements sont notoirement insuffisants pour mener à bien cette tâche et surtout aucun réseau intégré de défense anti-aérienne n'existe. Malgré la livraison entre 1998 et 2002 de six radars chinois JY-14, d'une portée de 300 kilomètres, qui sont venus compléter les AR-3D (portée 200 kilomètres), l'ensemble du pays n'est pas couvert, en particulier en raison du relief accidenté du terrain. Les systèmes d'alerte sont faibles dans le domaine des vols à très basse altitude et ont un manque de résistance aux contre-mesures. L'Iran aurait les plus grandes difficultés à intercepter des missiles de croisière et des missiles balistiques.

La création de cette nouvelle armée est aussi destinée à unifier l'ensemble de la défense aérienne sous un commandement unique. Cela doit accroître notablement la coordination des moyens d'alerte, la gestion des matériels et leur répartition sur le territoire. Sauf si ce commandement est décapité par une frappe.

19 sites de missiles sol-air opérationnels en dur ont été répertoriés par les services de renseignement occidentaux. Trois sont armés de HQ-2B (copie chinoise du SA-2 Guideline russe, la version iranienne se nomme Sayyad-1), dix de Hawk et six de SA-5 Gammon S-200. La défense rapprochée de ces sites est généralement assurée par des ceintures de batteries anti-aériennes équipées de canons de différents calibres. 19 autres sites non occupés mais pouvant être armés à tout moment ont également été localisés. En ce qui concerne les armements, l'Iran possède également 25 SA-6 Gainful, des Shorad, 29 Tor-M1 (SA-15 Gaunlet), 12 Pantsyr S-1, des SA-8 Gecko et quelques FM-80/90 (HQ-7), copie chinoise du Crotale R440, nombre de missiles portables (Manpads) et de canons anti-aériens.

Bien que la quasi-totalité du territoire iranien puisse être couverte par ces batteries, l'effort a surtout porté sur la défense des zones sensibles que sont Téhéran et ses environs, Natanz, Ispahan, Shiraz, Bushehr, l'île de Kharg, Bandar Khomeiny, Ahwaz, Dezful, Kermanshah, Hamadan, Tabriz et Bandar Abbas. La tactique connue des Iraniens est de placer des armements au milieu de zones urbaines ce qui présente deux avantages : le premier, de faciliter leur dissimulation ; le deuxième, de faire hésiter l'adversaire éventuel à les bombarder.

Les Américains effectuent des intrusions aériennes régulières pour obliger les Iraniens à allumer leurs systèmes radar et les repérer, de même des drones et des TR-1 survolent en permanence le territoire pour repérer et classifier l'ensemble des menaces sol-air afin de garder à jour l'Electronic Order of Battle (EOB) qui dresse la liste des premières cibles à anéantir pendant la phase de suppression des défenses adverses. La Russie moins tolérante à l'égard de l'Iran a renoncé à livrer son système S300 de missiles antiaériens, lequel aurait rendu très difficile une campagne aérienne. En revanche, la Russie vient de livrer à l'Arabie saoudite, son système S400, le nec plus ultra en matière de défense antiaérienne. Les zones de pénétration à haute altitude ne sont donc pas sous le feu de la défense anti-aérienne iranienne ; une faiblesse qui saura être exploitée.

 

Les principaux objectifs industriels

Le plus gros du développement nucléaire de l'Iran a été mené à bien dans des usines souterraines construites à une profondeur de 20 à 50 mètres, avec des dalles de béton armé qui les protègent contre toute attaque par les armes conventionnelles.

Actuellement, en Iran, il y a près de 240 installations de production militaire, toutes sous le contrôle des Pasdaran, dont les principales branches sont: munition, armement terrestre, aéronautique et aérospatial, missiles balistiques, et R&D d'armes biologiques et chimiques. Le plus grand complexe industriel, bâti à l'aide de la Corée du Nord, se trouve à Isfahan, où sont produits aéronefs, chars, munitions et propergols pour missiles. Le deuxième centre, réalisé grâce à la collaboration de Pékin, est à Semnam, à 150 km de Téhéran, il focalise son activité dans le domaine des missiles non balistiques. Sa capacité productive est estimée à un millier de missiles par an. Un autre objectif est l'Aciérie Nationale Iranienne à Ispahan, puisqu'elle fournit les produits métallurgiques militaires. Un complexe baptisé Lavizan II ou Mojdeh est situé à quelques kilomètres au nord-ouest de Lavizan et aurait récupéré une bonne partie des activités développées à Lavizan-Shian. Il jouxte l'ouest de l'université Malek Ashat qui, avec ce centre, constitue le Centre de préparation et de technologie défensive avancée, organisme qui camoufle en fait la direction de la recherche militaire dans le domaine nucléaire. Ce site est dirigé par le brigadier-général des Pasdarans Hosseini Tash, qui est aussi secrétaire adjoint du Conseil suprême de la sécurité nationale (CSSN), la plus haute instance de défense en Iran. Une partie des installations de Lavizan II a été enterrée en 2004.

Un autre complexe secret est enterré en pleine ville de Téhéran à proximité de Shahrak-e-Bazi (Miny-City) sur la route de Lashkarak. Son nom de code est Tunnel Hormuz. Il s'enfonce à 50 mètres sous terre pour rejoindre quatre galeries parallèles, et ses parois sont fortifiées afin qu'aucune radiation, aucun bruit, aucune émanation ne soie détectable depuis la surface. Les activités dans ces tunnels souterrains ne sont pas connues, mais les mesures de protection et de discrétion prises laissent entendre qu'il s'agit de travaux sensibles. La forte densité de population doit empêcher une éventuelle frappe aérienne.

L'université Imam Hossein, au nord-ouest de Lavizan, abrite un département de physique nucléaire où des chercheurs travaillent à des applications militaires. Cette université dépend des Pasdarans. L'université technologique de Sharif possède également un département de physique nucléaire qui participe aux recherches à caractère militaire. Toujours dans la même région, il existe un important complexe de fabrication de missiles sol-sol connu sous le nom d'Hemmat. A Parchin, une technologie d'enrichissement de combustible nucléaire au laser serait en fonction. A une trentaine de kilomètres au sud-est de Téhéran dans la région de Khojir sur un complexe de 120 km² se trouve un site d'expérimentation de missiles balistiques et des recherches dans le domaine de la conception de têtes nucléaires pour missiles seraient en cours. Ce programme ultrasecret développé sur une partie sécurisée du complexe, est connu uniquement sous le code Nori 8500.

 

Le "Massive Ordnance Penetrator"

Les Iraniens ont enterré profondément tous leurs centres de décision et sites industriels vitaux. Pour détruire ces cibles stratégiques, l'armement conventionnel est totalement obsolète et les Bunker-buster classiques peu efficaces.

Le Pentagone a donc financé le développement par Boeing de la GBU-57A/B MOP (Massive Ordnance Penetrator) dérivée de la GBU-43/B MOAB (Massive Ordnance Air Blast Bomb) testée pour la première fois en mars 2003. La MOP est une bombe massive de 13.608kg comportant 2,7 tonnes d'explosif à fort pouvoir détonant. Outre le fait d'être guidée par satellite (système de navigation inertielle assistée par GPS), comme la MOAB, cette bombe a une capacité de pénétration jusqu'à 60 mètres sous le niveau du sol. C'est l'engin non nucléaire le plus destructif de l'arsenal de l'US Air Force. Elle peut être utilisée pour des cibles situées à une profondeur plus grande que les bombes anti bunker les plus performantes telle la GBU-28 de 2.268kg, conçue en 1991, qui pénètre à 30 mètres. D'un point de vue technique, c'est une bombe à charge pénétrante qui utilise l'énergie cinétique. Le principe de charge pénétrante n'a rien de nouveau, la plupart du temps, il suffit d'une simple modification du temps de détonation à l'impact pour qu'une bombe devienne pénétrante. Cette bombe n'a qu'une seule mission et n'a pas d'autre utilisation qu'en Iran.

Pour transporter et délivrer cette arme, l'US Air Force a initié un énorme chantier de modification structurelle de ses bombardiers Stealth B-2 Spirit. La transformation a eu lieu à partir de juin 2007 et est terminée. Modifier l'entièreté de la flotte de B-2 signifie qu'un choix décisif a été fait, car on ne peut réinstaller à bord le panier rotatif qu'en recommençant de longs et couteux travaux. Dans la même logique, la base de Diego Garcia dans l'Océan Indien, a été réaménagée pour recevoir un stock de MOP et permettre le déploiement de 4 B-2 Spirit. Chaque B-2 peut donc dorénavant transporter 2 MOP, l'association la plus destructrice jamais réalisée par l'US Air Force.

 

Des exercices révélateurs

Alors qu'en Europe les exercices de l'Otan sont depuis 2008 singulièrement plus importants que les années précédentes, au Moyen-Orient plusieurs de ces exercices ont révélés l'état de préparation avancé des forces.

En octobre 2009, Israël et Etats-Unis mènent leurs plus importantes manouvres anti-aériennes conjointes en simulant des attaques de missiles contre l'Etat hébreu. Un millier d'hommes du Commandement américain en Europe et un nombre égal de soldats israéliens prennent part, dans le Sud d'Israël, à Juniper Cobra. Une quinzaine de navires de l'US Navy sont déployés dans l'est méditerranéen et douze avions de transport, remplis d'équipement, sont basés dans le Néguev. L'exercice est destiné à préparer le pays à toute attaque par missiles provenant d'Iran. Durant ces manouvres, sont testés, dans des simulations de plusieurs scénarios, les batteries anti-missiles Arrow 2, ainsi que les systèmes de défense antibalistique de haute altitude THAAD, le radar naval Aegis, les systèmes Patriot PAC-3 et Hawk. Objectif de l'opération : mettre en place une ossature défensive, en intégrant dans l'arsenal israélien le missile américain de basse altitude Patriot PAC-3, dédié à la destruction des missiles balistiques tactiques et en harmonisant les différents systèmes. A l'issue de l'exercice, début novembre, les Etats-Unis laissent en Israël plusieurs systèmes Patriot. En octobre 2008, l'administration Bush avait offert à Israël un radar X-Band installé dans le Néguev, capable de détecter des missiles à 1.900km de distance et de lancer une alerte entre 5 à 7 minutes avant une attaque.

Dans le même temps, le ministère iranien des Affaires étrangères s'insurge officiellement sur l'intensification des survols par les avions-espions américains. Il ne croit pas si bien dire : le 1 décembre 2009, le journaliste spécialisé Jean-Dominique Merchet publie sur son blog Secret Défense la photo d'un drone inconnu vu sur la base de Kandahar en Afghanistan. Il faut moins de cinq jours pour apprendre qu'il s'agit du RQ-170 Sentinel opérés par un Squadron de la base de Tonopah dans le Nevada. L'appareil est dédié à la reconnaissance et à la surveillance à haute altitude. Depuis des mois, plus rien n'échappe à la vigilance électronique US.

A l'issue du Dubaï Air Show, du 15 novembre au 9 décembre 2009, un exercice de grande ampleur se déroule à Al Dhafra, la grande base aérienne des Émirats où sont déployés de manière permanente des Mirage 2000-5 français. L''Advanced Tactical Leadership Course (ATLC), un TLP adapté au Moyen-Orient que les Américains appellent Iron Falcon, s'y déroule depuis deux ans, mais cette année il réunit un plateau exceptionnel : 6 Rafale et 6 Mirage 2000-5 français, 6 F-16 Block 60 et 6 Mirage 2000-9 émiratis, 6 F/A-22 Raptor et 6 F-16CJ américains, 6 Typhoon anglais et autant de F-16MLU jordaniens et de F7PG pakistanais ; soutenus par un Awacs et des ravitailleurs. Près de 60 avions de combat vont simuler des raids d'importance (jusqu'à quarante avions simultanés) dans «des missions réalistes représentatives d'un conflit de haute intensité» et qui vont se dérouler chaque jour. Le dispositif s'insère dans l'activité normale de la zone où chaque jour des dizaines d'appareils effectuent des missions au dessus du Golfe. De quoi rendre nerveux les Iraniens à quelques encablures.

Premier enseignement, l'US Air Force a résolu les problèmes relatifs au déploiement du F/A-22 en Opex. L'avion est en effet à ce point complexe qu'aucun détachement opérationnel extérieur n'avait pu être réalisé jusqu'à celui-ci. Les Rafale sont des visiteurs habituels d'Al Dhafra. Depuis mai 2009, l'Armée de l'Air française a initié un nouveau type de mission. Des Rafale de St Dizier effectuent des vols sans escale jusqu'à Abu Dhabi à 5.000km ; à peine au sol les équipages sont relevés, deux missiles de croisière Scalp-EG prépositionnés sont arrimés à chaque avion qui redécolle dans la foulée pour simuler une attaque d'infrastructures d'intérêt tactique.

Six jours après le démarrage de l'exercice ATLC et alors que les défenses iraniennes ont déjà été testées par les participants à l'exercice, le nouveau commandement iranien de la défense anti-aérienne annonce le début de manouvres militaires d'une ampleur sans précédent, sensées exhiber les capacités de défense en cas de frappe extérieure. «En raison des menaces qui pèsent sur nos sites nucléaires, il est de notre devoir de défendre les installations vitales de la nation» déclare le général Ahmad Mighani, chef de la défense antiaérienne. Ces manouvres vont durer 5 jours sur 600.000 km². Une aubaine pour les Rafale, Mirage 2000, Typhoon et Raptor : toutes les émissions électromagnétiques et radar sont soigneusement détectées pour enrichir les bibliothèques des systèmes de contre-mesure. En allumant l'ensemble de leurs systèmes, l'ordre de bataille a pu être visionné en temps réel. Les Iraniens ont vraiment eu peur et ont donné un coup de pouce supplémentaire aux renseignements occidentaux.

Depuis décembre 2009, il ne se passe plus un jour sans que les satellites, drones et avions de renseignement ne surveillent le dispositif iranien gardant à jour l'ordre de bataille.

C'est dans ce contexte qu'Israël vient de lancer un nouveau satellite espion Ofek-9, doté d'une caméra de très haute résolution et que l'exercice Juniper Stallion 2010 a permis, il y a quelques semaines, à l'US Navy d'entraîner les pilotes de F-18 Super Hornet du porte-avion Harry S. Truman dans le sud d'Israël où le range de Nevatim-2 a été mis à leur disposition.

Dans le même temps, Téhéran a annoncé une mobilisation au nord-ouest du pays, au bord de la mer Caspienne, le régime des Mollahs s'inquiétant de ce qui se trame en Azerbaïdjan. Le régime de Téhéran a envoyé ses meilleures troupes, les plus fidèles, les Gardiens de la Révolution, pour s'opposer, selon ses dires, aux forces américaines et israéliennes qui seraient concentrées à sa frontière nord ; mais ce qui l'inquiète vraiment c'est l'activité inhabituelle des bases de l'Otan installées depuis janvier 1999 dans cet ancien satellite soviétique totalement sous influence occidentale.

La guerre psychologique et la propagation de rumeurs, une des grandes spécialités américaines, font désormais partie des ultimes préparatifs en vue d'anéantir le potentiel de nuisance des locataires des palais perses. Et pour préparer les opinions publiques européennes à l'inéluctable, le 18 juin dernier, le Secrétaire à la Défense Robert Gates affirmait que «l'Iran pouvait lancer contre l'Europe des missiles à court et moyen rayon d'action. Je pense que nous n'accepterons pas l'idée d'un Iran nucléaire».

De quoi justifier un acte d'autodéfense légitime.