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Quelles
Leçons à Tirer de l'Expulsion du Goush Katif, il y a 20 Ans ?
Le retrait de Gaza en
2005 portait en lui les germes du 7 octobre
Par Daniel Haïk, analyste politique i24NEWS
01 août 2025
Il y a 20 ans, au lendemain du jeûne de Tichaa Beav 2005 qui marque la destruction du Temple et la perte de la souveraineté juive sur la Terre d'Israël, Ariel Sharon mettait en application sa décision d'évacuer quelques 10 000 habitants du Goush Katif, le bloc d'implantations juives situées dans le sud de la Bande de Gaza, entre Khan Younès et Rafah. Avec sa main de fer et la complicité de Tsahal, Sharon avait alors fait évacuer ces milliers d'habitants qui, 20 ans après, n'ont ni oublié ni pardonné… Car deux ans plus tard le Hamas prenait dans le sang le contrôle de la bande de Gaza et entamait ses préparatifs en perspective du plan machiavélique que son leader Yahya Sinwar avait projeté un matin du 7 octobre 2023. Avec ces 20 ans de recul, et 2 ans après le grand malheur d'Israël, il est temps de tenter de tirer quelques leçons sur ce qui nous est arrivé à l'époque.
Pour les Gazaouis, tout retrait est synonyme de faiblesse
Et pour illustrer ce qui s'est imposé comme une évidence ces dernières années, un épisode vécu : en mars 1993, à l'issue d'une période de réserve militaire mouvementée dans la Bande de Gaza, j'étais allé rendre visite a mon ami Ariel agriculteur dans la localité de Gadid dans le Goush Katif. Lorsque je lui ai raconté que nous avions essuyé des tirs de terroristes palestiniens, il m'a raconté ce que son contremaitre arabe, habitant de Khan Younès, lui avait confié : "Ariel, le soir à Khan Younès, nous discutons entre nous. Et aujourd'hui nous savons que nous allons vous chasser d'ici, tôt ou tard. Vous ne tenez pas suffisamment à cette terre !" C'était en 1993, quelques mois avant Oslo, 12 ans avant l'évacuation du Goush Katif.
Une évacuation certes initiée par un gouvernement israélien, mais qui confirmait que pour Ariel Sharon, le Goush Katif dont il avait été l'un des fondateurs, était devenu un fardeau dont il fallait se débarrasser. Sans se préoccuper des conséquences d'une telle décision. Sans comprendre que celle-ci serait interprétée par les Palestiniens de Gaza comme l'ultime marque de faiblesse. "Celui qui abandonne une terre c'est que celle-ci ne lui appartient pas vraiment" avaient affirmé alors les Palestiniens….!
L'atout d'une
présence de localités juives
Le départ des habitants du Goush a permis de mesurer à quel point la présence de localités juives au cœur de zones palestiniennes étaient stratégiquement importante. Depuis ce départ dramatique, le Hamas a pu impunément développer de gigantesques infrastructures terroristes dans la bande de Gaza. Qui peut prétendre aujourd'hui qu'avec la présence des habitants juifs, les terroristes du Hamas auraient pu creuser ces quelques 500 km de "métro" sous la bande de gaza sans être remarqués ? Tsahal a quitté Gaza en 2005 et comme l'ont avoué ensuite des cadres du Shin Bet, nous avons ensuite été totalement aveugles.
Le péché de l'unilatéralisme
Le retrait israélien du Sud-Liban en mai 2000, l'avait révélé. Le retrait du Goush Katif en 2005 l'a confirmé. Israël a commis une erreur impardonnable en évacuant unilatéralement, c'est-à-dire sans accord, le Goush Katif. En agissant de la sorte, le gouvernement Sharon a crée un dangereux précédent. Dans le conflit qui nous oppose aux Palestiniens tout retrait unilatéral est avant tout une récompense pour le terrorisme du Hamas… et du Fatah.
Le retrait du Goush, révélateur des réelles intentions palestiniennes
Au lendemain du retrait israélien du Goush Katif, la communauté internationale a voulu saisir l'occasion qui se présentait pour encourager les Palestiniens sur la voie d'un Etat indépendant. Gaza serait donc le laboratoire expérimental d'un futur Etat palestinien en Judée-Samarie. Les projets de transformer Gaza en Singapour du Moyen-Orient ont été déposés sur la table des Palestiniens. Gilbert Trigano a envisagé de créer sur les plages gazaouies un Club Med…Le coup d'Etat du Hamas en 2007 a prouvé que les Palestiniens avaient un seul et unique objectif : détruire Israël et qu'ils étaient prêt à tout, y compris a renoncer à un Etat indépendant, pour le concrétiser. On a vu à quel point ils étaient prêts d'y parvenir, le 7 octobre 2023.
La Droite
nationaliste avait raison…
On peut aimer ou détester Smotrich. On peut qualifier ses sympathisants de messianistes et d'illuminés. Mais en 2005, la mouvance sioniste religieuse qui s'est battue (légalement) pour empêcher l'évacuation du Goush Katif avait su prédire les malheurs que cette démarche allait provoquer. Elle avait vu juste lorsqu'elle affirmait que l'évacuation des habitants du Goush Katif et des forces militaires qui garantissaient leur sécurité, allait menacer le territoire israélien. « Il y aura des tirs de missiles sur Ashkelon », avaient menacé ces militants nationalistes. Et ils étaient en deçà de la réalité. Car tranquillement installés sur les vestiges du Goush Katif, les terroristes du Hamas ont développé une terrible industrie de la mort en produisant impunément des dizaines de milliers de roquettes et missiles qui au cours des 20 dernières années ont frappé jusqu'à la métropole de Tel Aviv et même à Jérusalem !
En 2005, le sionisme religieux avait vu venir ce danger tout comme il l'avait vu venir lorsqu'il avait reproché dans les années 1994, au gouvernement Rabin signataire des accords d'Oslo, de fournir des armes aux soi-disant policiers de l'Autorité Palestinienne. Ces mêmes armes qui ensuite, lors de la Seconde Intifada, se retourneront contre les civils israéliens et provoquerons un incroyable bain de sang. Smotrich a certainement un langage qui embarrasse. Mais plus d'une fois, ces 20 dernières années, lui et ses semblables des courants "messianistes" ont eu bien plus souvent raison dans leurs pronostics que les partisans de la Paix Maintenant ! Voilà peut-être, au moins, une bonne raison pour ne pas se moquer des revendications actuelles des supporters de Smotrich en faveur de la reconstruction d'implantations juives dans la bande de Gaza…
Sharon, un bulldozer
doublé d'un dictateur
Quelles que soient les raisons profondes qui l'ont conduit à décider de l'expulsion du Goush Katif (pour échapper à la justice, pour résoudre le problème démographique de Gaza, ou autres encore), Sharon a donné aux Israéliens à goûter à la dictature pour pouvoir aller jusqu'au bout de son projet. Rappel : après avoir annoncé au forum d'Herzliya sa décision d'expulser les habitants du Goush, Sharon s'est heurté à une très farouche opposition au sein même du Likoud, le parti qu'il avait fondé en 1973 ! Il a donc organisé un référendum, le 2 mai 2004 pour connaitre les intentions des électeurs du Likoud. Et il a promis qu'en cas de rejet, il abandonnerait ce projet. 60 % de ces électeurs ont voté contre… Mais Sharon a balayé leur avis et est allé de l'avant. Face à l'opposition de deux ministres de la droite nationaliste, Avigdor Liberman et Benny Elon, Sharon a tout simplement décidé de les limoger. Tel un bulldozer, Sharon a fait fi de toutes les mises en garde. Il a décidé seul et est allé jusqu'au bout seul. Et le plus surprenant c'est que la Cour Suprême, le conseiller juridique de l'époque Meni Mazouz, et les médias ont cautionné tous ses écarts sans sourciller. Probablement parce qu'ils s'identifiaient massivement à cette démarche qui mettait fin à "l'occupation" de la bande de Gaza.
Après le Goush ,
il n'y aura pas d'autres retraits….
Certains experts affirment que Sharon a initié son plan de retrait du Goush Katif parce qu'il voulait faire oublier les enquêtes judiciaires dans lesquelles il était incriminé. D'autres prétendent que Sharon a voulu résoudre le problème démographique de Gaza et cesser de contrôler 2 millions de Gazaouis. Mais une chose est sure : ces mêmes experts s'étaient accordés à dire que l'évacuation du Goush Katif en 2005, est un événement unique qui n'a quasiment aucune probabilité de se reproduire. N'en déplaise aux pays qui ont l'intention de reconnaitre un Etat palestinien, l'expulsion du Goush Katif a provoqué un tel traumatisme dans la société israélienne que l'on ne voit pas comment d'autres retraits même plus réduits pourront être envisagés en Judée-Samarie. Et, surtout, on ne voit pas quel autre leader israélien aura suffisamment de charisme et de popularité pour enclencher une telle démarche….
Le retrait, porteur
des germes du 7 octobre
Lorsque les 10 000 habitants du Goush Katif ont franchi en autobus, pour la dernière fois, le poste de Kissoufim sur la route de leur exil, des habitants des localités et kibboutzim du pourtour sont venus les accueillir en brandissant des banderoles : "Bon retour au pays!". A l'époque, l'immense majorité de ces habitants du pourtour s'étaient prononcés en faveur de l'évacuation des résidents du Goush Katif. "Cela va mettre fin à l'occupation" avaient affirmé certains. Mais, malheureusement personne, au sein de cette population, n'a compris alors que ce retrait portait en lui les germes de son futur malheur, les germes du 7 octobre. "Ils n'avaient pas compris qu'ils allaient se retrouver en première ligne face au Hamas. Ils pensaient qu'après qu'Israël ait évacué, les Palestiniens allaient construire leur pays et n'auraient plus la moindre raison d'attaquer", s'est souvenu Michael un ancien habitant du Goush. Pour ces habitants du Pourtour, le 7 octobre a été le plus douloureux des réveils. Mais pas pour les anciens résidents du Goush….