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OU SONT LES PROTESTATIONS ARABES

A PROPOS DU DARFOUR ?

 

Par Eran Tzidkiahou

Jerusalem Post du 17 mars 2009

Traduction pour INFO’SION par Nicole Benattar

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Ces dernières années ont vu une révolution médiatique dans le monde arabe de sorte que maintenant les médias reflètent assez bien l’atmosphère de la rue arabe autant que le consensus des régimes arabes. Les critiques visant les crimes commis par l’occupant sioniste en Palestine sont largement couverts alors que les autres horreurs qui ont lieu dans la région reçoivent peu d’attention surtout si elles sont le fait d’acteurs régionaux et non pas des Américains, des Européens ou des Juifs. La condamnation d’Israël dans cette région ne correspond pas aux normes humanitaires habituelles mais à des normes spécialement réservées au conflit israélo-palestinien.

Les critiques contre Israël, leur sévérité et leur volume, éclipsent la couverture de l’actuel conflit au Darfour par exemple. Ce conflit a fait au cours des dernières années un quart de million de victimes et des millions de réfugiés. Le nettoyage ethnique qui s’y déroule est bien pire que toute autre crise régionale et ne peut être comparé au conflit israélo-palestinien, ni par son essence ou son volume.

Le silence des médias arabes concernant l’aspect humanitaire du conflit au Darfour est renforcé par le fait que le Soudan est un membre actif de la Ligue Arabe.

En 2007, le Groupe International de Crise et l’université américaine du Caire tinrent un atelier sur la couverture médiatique de la crise au Darfour. Les participants, des journalistes confirmés et des universitaires du monde arabe, affirmèrent que les médias arabes ne consacraient pas assez d’attention à la crise au Darfour en comparaison des médias occidentaux et surtout en comparaison de l’attention consacrée aux autres conflits du Moyen Orient. Leur rapport prétendait qu’en raison d’un manque de ressources mais aussi d’un manque d’intérêt ainsi que du racisme, les aspects politiques de la crise du Darfour prenaient le pas sur les aspects humanitaires, la couverture de ces derniers étant superficiel le et inexacte.

Les critiques d’Israël émanant de pays tels que le Soudan, l’Egypte, la Jordanie, la Turquie et la Syrie sont empreints  d’hypocrisie car tous ces pays oppriment leurs minorités et violent ouvertement les droits de l’homme.

Au Soudan, la milice tribale des Janjaweed est soutenue par le président Omar el Bashir, lui-même est accusé de génocide par le Tribunal International. En juillet 2008, immédiatement après sa mise en accusation par ce tribunal,  la Ligue Arabe, dont plusieurs membres accusent Israël de crimes de guerre, ont publié une déclaration de soutien du président soudanais.  Néanmoins, certains dans le monde arabe approuvèrent la décision du Tribunal International et condamnèrent la déclaration de la Ligue Arabe, parmi eux se trouvent Abd el Rahman el Rachid, le directeur général de la télévision El Arabiya et ancien rédacteur en chef de Shark el Awsat.

Le monde arabe garda le silence en 1960, lorsque l’Egypte utilisa le gaz moutarde contre le Nord-Yémen,  en 1970 lorsque les Jordaniens tuèrent les Palestiniens, en 1980 lorsque la Syrie massacra des dizaines de milliers de ses propres citoyens qui soutenaient les Frères Musulmans et en 1990 lorsque Saddam Hussein assassinaient les Kurdes et les Shiites en Irak. Les minorités religieuses et ethniques subissent une discrimination  importante dans de nombreux pays du Moyen Orient.

Depuis que le premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan a quitté l’estrade devant les caméras de télévision lors du Forum Economique de Davos,  la Turquie est devenu le porte-drapeau des anti-israéliens. La Turquie accuse Israël de crimes de guerre tout en étant incapable d’affronter son rôle passé dans le génocide arménien et elle fait pression sur les universitaires et les diplomates pour éviter tout débat sur le sujet. Aujourd’hui encore, la Turquie opprime militairement et culturellement la minorité kurde en lui refusant le droit à l’auto-détermination.

Selon Reporters Sans Frontières, le plus grand ennemi de la liberté de la presse dans les pays arabes est l’auto- censure que les journalistes pratiquent sur les sujets sensibles. En raison de ces restrictions, ils reportent leurs critiques contre Israël qui demeure le bouc émissaire et la cible de la rage des Arabes et des Musulmans contre tous les maux du monde. Les pays arabes auraient fort intérêt à examiner de l’intérieur leurs problèmes de société.

Ces exemples n’exemptent pas Israël de toute critique. Qu’il soit perçu comme un pays qui lutte pour son existence ou comme un occupant agressif, la critique extérieure est un facteur d’équilibre nécessaire. Un dialogue est déjà en cours à l’intérieur du pays et de nombreuses organisations  profitent  de leur liberté pour critiquer durement l’état. Dans le même temps, des crimes de guerre commis par des pays voisins ne dispensent pas Tsahal d’enquêter sérieusement sur le nombre élevé de pertes civiles lors de l’opération de Gaza.

En tout état de cause, les médias de la région doivent rendre compte de façon proportionnelle car une couverture biaisée du conflit est trompeuse, elle diabolise Israël et crée dans la rue arabe une haine virulente à l’égard d’Israël et des Juifs. Cette atmosphère augmentera la difficulté pour les régimes arabes modérés d’expliquer à leurs populations les initiatives de paix qu’ils soutiennent. Tandis que les médias arabes couvrent largement toute agression  occidentale ou israélienne contre des arabes ou des musulmans, ils ignorent les agressions des arabes et musulmans contre d’autres arabes, musulmans ou africains. Cet écart dans la couverture indique que les Arabes exigent une plus grande moralité de la part d’Israël et de l’occident que de leur part à eux.

La critique contre Israël doit être faite en veillant à la proportionnalité des intérêts politiques et internationaux. Les questions de moralité et de justice sont du ressort des philosophes ou de médias équilibrés prêts à critiquer toutes les parties sans préjugé et conformément aux normes humanitaires internationales.