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LE MOUVEMENT NATIONAL PALESTINIEN A VECU

 

Par Danny Rubinstein
Ha'Aretz

Traduit par Courrier International hebdo n° 889 - 15 nov. 2007

 

Au moment où doit s’ouvrir à Annapolis une conférence pour la paix au Moyen-Orient, Ha’Aretz fait le constat du quasi-décès de l’OLP. Une situation qui permet aux Etats arabes de reprendre la main.

En 1971, l’historien Yehoshua Porath publiait un livre essentiel : L’Emergence du mouvement national arabe palestinien, 1918-1929 (1). S’il devait reprendre ses recherches cinquante-trois ans plus tard, il devrait sans doute les intituler Décadence et agonie du ­mouvement national arabe palestinien. ­Censée être une étape cruciale dans la réalisation des aspirations nationales, la création de l’Autorité palestinienne (AP) [1994] s’est révélée un désastre total. Cela fait de longues années (depuis le milieu des années 1990) que les institutions de l’OLP, dont l’ambition était de représenter toutes les fractions du peuple, ne sont plus en phase avec la réalité politique palestinienne. Ainsi, elles n’ont jamais intégré le courant nationaliste religieux incarné par un mouvement aussi important que le Hamas, lequel représente pourtant un bon tiers de l’opinion palestinienne. Ce qui n’empêche pas le Comité exécutif (gouvernement de l’OLP) et le Conseil national (Parlement de l’OLP) de compter en leur sein des organisations nationalistes de gauche (FPLP, FDLP, etc.) qui n’existent pratiquement plus.
Un symbole cruel de la déliquescence du nationalisme palestinien réside dans le nombre de hauts responsables qui ont quitté le navire. Nabil Shaath, ministre revenu d’exil avec ­Arafat en 1994, s’en est retourné au Caire pour y gérer des affaires bien plus juteuses. Mohammed Dahlan, qui fut longtemps parmi les personnages les plus influents et les plus redoutés de la bande de Gaza [il était responsable de la sécurité], passe désormais le plus clair de son temps au Caire. Un millier de hauts fonctionnaires – revenus dans les années 1990 prendre la direction des administrations créées par l’AP – se sont installés ou réinstallés à Amman (en Jordanie). Ils ont préféré fuir ­plutôt que de subir l’effondrement de l’économie, les affrontements interpalestiniens, les tracasseries des barrages et les incursions de l’armée israélienne. Quant aux nombreux ministres, la plupart d’entre eux ne résident plus que partiellement en Cisjordanie ; leurs familles ont déménagé à Amman.

Plusieurs Etats arabes seront présents à Annapolis

Dès lors, les Etats arabes reviennent au premier plan dans la gestion du problème palestinien. Car l’expérience indépendante palestinienne est un échec et, contrairement aux conférences de paix précédentes, celle d’Annapolis (prévue fin novembre) conviera non plus les seuls Palestiniens, mais plusieurs Etats arabes, au premier rang desquels l’Arabie Saoudite et l’Egypte.
Ce n’est pas tout. Avec l’assentiment d’Israël, le royaume hachémite de Jordanie est en train de reprendre pied en Cisjordanie et à Gaza, tandis qu’à Jérusalem-Est les institutions officielles islamiques (dont les mosquées de l’Esplanade), un temps reprises en main par l’OLP, sont à nouveau dirigées par des responsables d’obédience jordanienne. De fait, dès lors que la construction du mur de séparation entre Israël et les Territoires se poursuit, les rapports entre la Cisjordanie et la Jordanie ne peuvent que s’intensifier.
Le vide laissé par un mouvement national palestinien anéanti est également comblé par des organismes islamiques aux antipodes du nationalisme. A Hébron et dans d’autres villes de Cisjordanie, on assiste ainsi à la montée en puissance du petit Hizb ­­ul-­Tahrir (Parti de la libération), un ­mouvement qui n’a pourtant qu’un programme religieux assez improbable : le rétablissement du califat (qui avait été mis en place au VIIe siècle !). Les exigences intangibles du mouvement national palestinien demeurent la création d’un Etat palestinien selon le tracé de la Ligne verte (qui, avant le 5 juin 1967, délimitait les territoires d’Israël d’une part, et de la Cisjordanie et de Gaza d’autre part) et avec Jérusalem-Est pour capitale. Quels que soient les avatars de ce mouvement, aucun Palestinien n’acceptera de compromis qui aille en deçà. Si Israël ne l’accepte pas, c’est tout le mouvement national palestinien organisé qui s’effondrera, voire disparaîtra. Il se peut que nous (Israéliens) trouvions cette nouvelle situation a priori plus confortable. Mais gageons que cette dernière ne tardera pas à se révéler dans toute sa laideur. (2)

Note

(1) The Emergence of the Palestinian-Arab National Movement, 1918-1929, Londres, Frank Cass, 1974.

(2) Note de www.nuitdorient.com : on s'achemine inéluctablement vers une solution de mandat arabe ou de tutorat extérieur des territoires cédés aux Palestiniens.

L'Egypte étant réticente à administrer à nouveau Gaza, une solution du type Otan serait envisageable.