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L'EXHIBITIONNISME DANS LA TUERIE OU LE DÉBAT EN ISLAM SUR LES PRISES D'OTAGE ET LA DÉCAPITATION

 

Par Amir Taheri, commentateur politique iranien, basé à Paris.

Paru dans Wall Street Journal le 3 octobre 2004 et traduit par Bertus.

 

Quels otages est-il permis de prendre et qui peut-on tuer? Lors des dernières semaines, ces questions ont suscité de nombreux débats au sein de la communauté de l'Islam. La réponse qui en émerge peut être simplement résumée par "faîtes ce que vous voulez!"

En fait le débat avait été déclenché par les tueries atroces commises dans une école à Beslan, en Russie méridionale. Ce débat a été alimenté par des prises d'otage et par des assassinats "exhibitionnistes" en Irak.

Les non-musulmans peuvent trouver étrange qu'on débatte de ces sujets au lieu de les condamner comme des crimes répréhensibles. Mais le fait est que ces actions méprisables ont toujours été monnaie courante en Islam. Au 7ème siècle, en Arabie où l'Islam est né, prendre des otages était un acte habituel entre des tribus rivales et la décapitation publique était une arme de la guerre psychologique. Le prophète Mahomet a codifié ces pratiques, en interdisant les enlèvements sauvages et la décapitation au sabre. Ce nouveau code interdisait ainsi de prendre en otage un musulman, et de lui trancher la tête, pratiques réservées aux non-musulmans, au cours d'un conflit armé.

Pris au combat, un "infidèle" devait être traité en prisonnier de guerre. S'il se convertissait, il pouvait être libéré. On pouvait aussi demander une rançon pour le libérer ou l'échanger conter un prisonnier musulman. Femmes et enfants capturés lors d'une guerre deviennent la propriété privée de leur ravisseur musulman, les femmes pouvant devenir ses concubines ou être offertes comme présents à d'autres musulmans. Élevés dans l'Islam, les enfants captifs bénéficiaient des pleins droits accordés aux musulmans.

Quelques siècles plus tard, ce code a été revu par un descendant du prophète, l'Imam Jaafar Sadeq, selon deux directions. Tout infidèle se convertissant recevait sur le champ "la garantie totale de son sang", les autres étaient "protégés"(dhimmi) aussi longtemps qu'ils payaient la capitation (jiziya) à l'autorité.

Rappeler cet historique est important, car ce que nous vivons aujourd'hui est tout simplement une renonciation au code de l'Islam par certains musulmans, dans le but d'atteindre un objectif politique.

Un sondage effectué ces dernières semaines auprès des musulmans montre une condamnation quasi unanime du massacre de Beslan. Les raisons invoquées sont essentiellement politiques et non religieuses: "Ayant soutenu la cause palestinienne, la Russie ne méritait pas une telle punition" ! Sheikh Youssouf al Qadarawi, un érudit sunnite du Qatar a été un de premiers à condamner les massacres. En même temps, il insiste pour dire qu'une attaque similaire dans une école israélienne aurait été "justifiée, un écolier israélien devenant un soldat, il faut donc l'éliminer". Dans la même veine, ce sheikh si écouté justifie le meurtre de toute femme israélienne enceinte, car elle porte un futur combattant.

L'Ayatollah Imami Kashani qui travaille pour le gouvernement iranien est du même avis, argumentant que la Russie, malgré ce qu'elle a fait subir aux Tchétchènes, ne doit pas être visée, car elle soutient "une cause plus noble", celle de la Palestine! En d'autres termes, les musulmans Tchétchènes ont moins de valeur que leurs coreligionnaires palestiniens. Point de vue partagé par l'Organisation de la Conférence Islamique, regroupant 57 pays musulmans. Son secrétaire général, Abdelouahed Belkeziz a émis une ferme condamnation du massacre de Beslan, pourtant il n'a jamais dit mot à propos des dizaines d'attaques terroristes perpétrées par les islamistes à travers le monde.

 

Ce qui est implicite dans toutes ces tueries d'innocents, c'est que lorsqu'il s'agit d'infidèles, elles sont justifiées, pour autant qu'il ne s'agisse pas de victimes appartenant à des pays favorables à la "cause arabe". Cette attitude est confirmée par le kidnapping des deux journalistes français en Iran, le mois dernier. Amr Moussa, le secrétaire général de la Ligue arabe a mené une campagne pour qu'on les libère "la France est l'amie des arabes, et on ne traite pas ses amis de cette façon!"  Mohamed Hussein Fadlallah, le leader spirituel du H'ezbollah est venu en écho demander la libération des deux captifs, démarche qu'il n'a jamais effectuée pour aucun des 140 otages enlevés. Yasser Arafat a été même plus précis, dans un communiqué à Ramallah. "Ces journalistes soutiennent la cause palestinienne et la cause irakienne. Nous avons besoin de garanties pour la sécurité des amis qui soutiennent notre lutte!"

En termes clairs, les deux Français doivent être libérés pour leur soutien aux Arabes, et non pas pour des raisons morales, parce que prendre des otages est un acte répréhensible. Les autorités françaises sont renforcé ce sentiment. Le premier ministre Jean Raffarin, parle de l'insurrection irakienne comme d'une "résistance". Le ministre des affaires étrangères Michel Barnier a annoncé même que la France rejetterait toute conférence internationale sur l'Irak, proposée par l'administration Bush, "à moins que des éléments opposés à l'occupation y soient invités!"

Mr Belkeziz cité ci-dessus a aussi promis de tout faire pour libérer les otages français. A-t-il émis la moindre demande à propos des otages d'une trentaine de nations, y compris même des membres de sa propre organisation? A-t-il été ému par le meurtre de sang-froid de 41 otages, y compris des musulmans, de 11 différentes nationalités?

Abbassi Madani, un ancien leader du Front de Libération islamique, en Algérie a commencé une grève de la faim, "en solidarité avec ses camarades français". C'est quand même un peu fort venant d'un homme dont le parti et ses alliés ont provoqué la mort de plus de 200 000 algériens dans les années 90! Mr Madani n'a jamais raté un repas de solidarité pour commémorer les innombrables Algériens, y compris des femmes et des enfants, que ses "camarades islamistes" ont occis!

L'attitude des organisations musulmanes en France et en Angleterre est encore plus inquiétante. Ces deux communautés ont envoyé des délégations en Irak pour contacter les terroristes et pour demander la libération des deux Français et d'un Britannique. La délégation française menée par Mohamed Bechari en a profité pour vanter publiquement l'héroïque opposition de la France à la guerre d'Irak en 2003. Mr Bechari annonce aux reporters "Je suis ici pour défendre la politique arabe de la France! En Irak aussi bien qu'en Palestine, la France est avec les Arabes" . Les deux délégués britanniques étaient obligés de trouver d'autre arguments, disant "bien que l'Angleterre ait participé à renverser Saddam Hussein, la majorité des anglais y étaient opposés!" Ainsi l'otage britannique Ken Bigley devait être relâché, non pas parce que la prise d'otage est répréhensible, mais parce qu'un tel acte renforcerait le sentiment anti-guerre britannique.

 

En refusant de rejeter catégoriquement la terreur, les leaders musulmans et les leaders d'opinion contribuent à perpétuer une situation dans laquelle personne n'est assuré de sa sécurité. Les attaques du 11/9 contre l'Amérique était basées sur la revendication du n°2 de 'Al Qaeda, Ayaman al Zawahiri, que tout citoyen d'une démocratie pouvait être assassiné, car étant un électeur présent ou futur, il participe à l'élaboration de la politique se son pays, La supposition que seuls les Américains et Israéliens étaient visés s'est révélée fausse, car les Islamistes ont assassiné des centaines de personnes de toute nation et de toute foi, y compris des musulmans, dans une douzaine de pays, lors de ces trois dernières années. Aujourd'hui, pour avoir carte blanche de millions de musulmans, y compris d'autorités officielles, pour kidnapper, tuer et l'exhiber, il suffit de s'intituler "moujahid", combattant pour la Palestine ou opposant à l'occupation en Irak.

Personne n'est plus en sûreté, qu'il soit musulman ou infidèle et ceci a été confirmé par une déclaration de Abou Anas al Shami, le moufti auto déclaré d'al Qaeda, en principe tué en Irak lors d'une attaque aérienne américaine, le mois dernier. Cet homme écrivait "il y a des moments où les moujahidoun ne peuvent pas perdre leur temps pour savoir qui est qui dans une bataille, il y a des moments où on doit admettre que toute personne qui n'est pas de notre côté est un ennemi".

La position d'Al Shami fait écho à une fatwa de feu Ayatollah Sadeq Khalkhali, un des fondateurs de la république islamique d'Iran. Il écrivait "Parmi ceux qu'on prend en otage ou qu'on tue, certains peuvent être innocents. Dans ce cas, Allah les prendra au Paradis. Nous faisons notre boulot et Lui fait le Sien!"

 

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